lundi 1 novembre 2010

Mosaïques à Ravenne

Il est parfois difficile d'imaginer ce que certaines villes ont signifié quelques siècles plus tôt, lorsqu'on retrouve l'or et la pourpre de l'ancienne capitale de l'Empire romain d'Occident, puis capitale du royaume d'Italie d'Odoacre, puis capitale du royaume des Ostrogoths, n'ayant laissé leur empreinte que sous forme d'irisations de verre, d'expressions figées, d'yeux glacés. Au-delà des frontières historiques, cette place forte de l'urgence, de la fuite devant le danger, éveille chez moi un sentiment déjà éprouvé dans d'autres villes italiennes: l'impossibilité de tout voir, le besoin d'élargir à l'infini le temps du voyage ou du séjour, le temps de l'éblouissement et de la désillusion, des deux n'étant pas incompatibles, un vrai gâchis en somme. A propos de Ravenne, Borges avait  décrit dans "Le Guerrier et la Captive", le ravissement de Drotctulft, qui ressemble à un syndrome de Stendhal particulièrement foudroyant : " Aucune de ces œuvres, je le sais, ne l’impressionne par sa beauté ; elles le touchent comme aujourd’hui nous toucherait une machine complexe dont nous ignorons la destination, mais dans le dessin de laquelle on devine une intelligence immortelle.Peut-être lui suffit-il de voir une seule arche, avec une inscription incompréhensible en éternelles lettres romaines.Brusquement,cette révélation l’éblouit et le transforme". Drotctulft le guerrier longobard abandonnera les siens afin de combattre du côté de Ravenne ; les signes incompréhensibles valaient peut-être "toutes les fondrières de la Germanie".






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